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Le Rhône est un long ’effluve’ tranquille

Pollution du Rhône : C’est la faute à Bancule ! [*]

Un arrêté préfectoral (de plus après ceux de 2005 et 2006) de la région Rhône-Alpes interdit depuis 2006 de consommer du poisson pêché dans le Rhône sur plus de 100 kilomètres de l’Ain à l’Isère.

Depuis juin 2007, ce sont les préfectures de la l’Ardèche et de la Drôme qui à leur tour ont pris un arrêté d’interdiction, élargissant la zone contaminée à 200 km, car la teneur en PCB des poissons pêchés en différents points du Rhône a atteint jusqu’à sept fois le seuil autorisé par l’Organisation mondiale de la santé.
Puis le 7 août 2007, les préfets du Vaucluse, du Gard et des Bouches-du-Rhône ont eux aussi signé un arrêté "en raison d’analyses défavorables", aux polychlorobiphényles (PCB ou pyralènes, un des douze polluants chimiques particulièrement dangereux, aussi appelés par l’ONU polluants organiques persistants POPs qui, ingérés régulièrement sur de longues périodes, provoquent des problèmes de fertilité, de croissance ou des cancers), "jusqu’à la mer".

Donc, depuis 2006, le Rhône a été enfin reconnu comme pollué aux PCB et la Durance ne vaut guère mieux.

Distribution gratuite de picogrammes

Cette zone est contaminée depuis 2005 par le PCB (polychlorobiphényle) et les dioxines, à des doses de 32,28 picogrammes par gramme (pg/g) en moyenne en 2006 et de 59 pg/g en juin 2007, alors que la norme recommandée est de 8 pg/g de matière brute dans les aliments.

Serait mise en cause une usine spécialisée dans le traitement des déchets spéciaux (anciens transformateurs), qui continue à déverser dans le fleuve des résidus de son activité (!) au risque de provoquer l’une des plus graves pollutions chimiques en France d’un cours d’eau. Mais aussi les mauvaises habitudes de prendre le Rhône pour un dépotoir à batteries usagées, les remblais ayant servi de comblement des bras morts et contenant peut-être les machefers à la dioxine (voir l’article >Le macadam-décharge), la remontée en surface de limons pollués antérieurement, et enfin la baisse des volumes d’eau à cause de la sécheresse augmentant la concentration des « polluants organiques persistants » (POP) cancérigènes, très peu biodégradables, qui s’accumulent dans les graisses le long de la chaîne alimentaire.…

Ainsi, vingt ans après leur interdiction, ces produits se retrouvent encore aujourd’hui dans le Rhône à côté d’autres cadeaux de l’industrie chimique, nucléaire et pharmaceutique…, qui ont été autorisés à considèrer le fleuve comme leur poubelle. Le fleuve et aussi la rivière, car dame Durance voit tout là-haut, à St-Auban dans le Var, s’écouler mercure et solvants dans ses eaux, à cause d’une usine locale dont la politique environnementaliste affichée, provoque l’interdiction de pêche dans le secteur. Ceci « améliore » grandement la qualité des limons déposés au long de son lit et de l’eau qui irrigue la Provence…

Louloute est avertie !

Les services préfectoraux signalent que malgré la surdose en question, il faudrait consommer régulièrement les poissons contaminés pour avoir des effets négatifs sur la santé… Or, la pêche est interdite…
Donc tout va bien !
Sauf que les poissons, les oiseaux, les insectes, les animaux, les végétaux ne lisent pas les arrêtés des Préfets et en profitent régulièrement depuis des années en autocontaminant la chaîne alimentaire par absorption ou consommation des uns par les autres.
Le tout se déplace dans le fleuve, ou se fossilise et se dépose dans son lit, ou nage vers la mer s’ajoutant dans l’eau aux autres pollutions !

Ainsi, c’est l’ensemble du milieu de Lyon à la mer qui « bénéficie » de picogrammes dits inoffensifs puisque la norme recommandée ne doit pas être dépassée…
- Le long du fleuve, les villes utilisant les eaux du Rhône pour leur consommation quotidienne sont nombreuses ! Il ne leur reste que l’espoir d’hypothétiques résultats d’une plainte contre X si leur maire a le courage nécessaire pour défendre ses administrés.
- Sur le fleuve, les professionnels ou touristes y naviguant, et ceux qui s’en servent pour leurs fabrications, ont du souci à se faire. Les centrales nucléaires utilisent les ressources d’eaux pour refroidir les tours, l’évaporation disperse les fumées au gré des vents.
- Grâce au fleuve, les nappes phréatiques de nombreuses contrées alimentent les populations puisant leur eau potable en sous-sol, ainsi que les animaux d’élevage et irriguent de nombreuses productions ou jardins produisant légumes, fruits, céréales…, mis en marché !
- Au bout du fleuve, la mer reçoit ses belles eaux dans lesquelles vont se baigner les vacanciers pendant l’été !
- Au bout du Rhône, il y a aussi notre précieuse Camargue, déjà en souci avec les limons perdus par les barrages ou déviations d’amont et le niveau croissant d’une mer envahissante.

Patatras, c’est la moule marine qui fait des siennes.

De 2004 à 2006, L’organisme officiel Ifremer a utilisé celle-ci, particulièrement sensible aux polluants en tous genres refilés à la mer, pour évaluer les niveaux de contamination des côtes méditerranéennes. C’est un excellent et beau travail de mesure.
Et, ce qui devait arriver, arriva !
En se goinfrant, la moule a viré au rouge devant les secteurs urbains et industriels ainsi qu’aux débouchés des grands fleuves trop pollués :
- Nickel à l’embouchure du Rhône ;
- DDT, interdit depuis 20 ans, au même lieu ainsi que près de la Cannebière,
- PCBs, dioxines et autres furanes ont élu domicile eux aussi près du vieux Port.
Il vaut mieux ne pas parler d’autres côtes espagnoles ou italiennes…
Mais attention, les niveaux mesurés pour ces contaminants datent de 2006 et depuis, la situation s’est forcément et évidemment améliorée, enfin peut-être, quoique c’est pas sûr !
Ces niveaux sont d’ailleurs considérés comme faibles et sans risques, et la moule au DDT ou furanes à doses faibles n’est donc pas interdite de consommation… Et bon appétit !
Les normes étant respectés par les moules, la pollution actuelle du Rhône étant contenue derrière les barrages, et la mer brassant le tout dans un grand élan de générosité, tout va très bien, madame la sardine, tout va très bien, tout va très bien…

Si la santé dans ces secteurs se dégradent, ce sera évidemment comme d’habitude la faute à « Bancule », puisque la norme picogrammatique interdite à la consommation ne pourra pas être mise en cause.

L’agitation gouvernementale du 29 mai 2008 vient de Lyon où le préfet avoue : « Le véritable enjeu, c’est la dépollution du Rhône et de ses affluents. Mais personne ne sait comment faire. Il n’existe aucun procédé au monde pour traiter de telles quantités. »

Bref, on a fait ceux qui ne savaient pas depuis 20 ans, on découvre l’ampleur du désastre qu’on a laissé faire (L’étude Calipso de l’Afssa et Inra en 2006 avait averti que sur 1 000 personnes mangeant au moins deux fois par semaine poissons et produits de la mer et pas seulement du Rhône, 60 % des plus gros consommateurs dépassent la dose journalière admissible en PCB…), on regrette, on s’excuse et surtout on ne cherche pas les coupables car il faudrait expliquer pourquoi on a laissé polluer, on étudie donc et l’on noie le poisson, c’est canicule bis et répétita mais insidieusement et pour longtemps…

Le phénoménal plan Borloo

Reste le Rantanplan Borloo pour tenter de noyer aussi la dioxine : « Identifier, maîtriser voire réduire les risques liés à cette pollution du Rhône »… Cela dure tout de même depuis des années sans que les autorités ne s’en émeuvent, et peut s’interpréter ainsi :
- « Le principe de précaution » était en fait un principe de pollution par le refus de la France depuis 2004 d’appliquer la directive européenne sur le pollueur/payeur (Le Sénat l’a votée en 2008 et peuchère, avant qu’elle ne s’applique).
- « La réduction (!) envisagée » des rejets de PCB, signifie donc que la pollution peut continuer.
- « Le contrôle sur les poissons de consommation » est renforcé, donc celui qui en mange a intérêt à faire partie de l’échantillon. Oubliés les autres poissons, les oiseaux, les végétaux, la vie quoi !
- Depuis 2005, la pollution durable « qui a surpris l’administration chargée de la surveillance » va être enfin soumise à une étude nationale d’imprégnation aux PCB des consommateurs et des poissons de rivière en 2009. Rapport en juillet 2010… Les poissons imprégnés en 2005, vont bientôt voir élaborer des recommandations nationales : Et les mêmes services qui ont laissé faire ou rien vu recommanderont puis contrôleront eux-mêmes un jour.
- « L’accompagnement des pêcheurs » touchés par les mesures d’interdiction (Exonération du paiement des baux de pêche et des charges sociales, attribution de nouveaux lots de pêche sains, soutiens financiers pour les investissements nécessaires, aides à la reconversion ou à la préretraite) : On n’indemnise pas les morts ou les malades inconnus, l’effet continu sur la santé des voisins des lieux pollués est laissé aux bons soins des médecins et Sécu, et l’industrie polluante refile les pertes et frais à l’Etat puisque ce dernier l’a autorisée à polluer (principe habituel de privatisation des profits et socialisation des pertes ou je pollue, les victimes payent).
- « Aucune disposition n’est prévue pour traiter l’actuelle pollution » et l’usine de traitement des pollutions envisagée coûte si cher que le financement va dépendre des régions…
Et il y a des borloocrates capables de bâtir un tel plan !

Le 8 juillet 2008 : Bancule est irradieux !

Une cuve déborde accidentellement et se déverse dans les rivières voisines et le canal Donzère-Mondragon vers le Rhône.
L’uranium du Tricastin s’écoule tranquillement hors d’une station de traitement, après une semaine de fuite non découverte, alors qu’on croyait que tout était prévu pour l’éviter !
On nous laisse même à penser que les 18 m3 de solution contenant 224 kg d’uranium vont s’évaporer par miracle dans les sols et les eaux, alors qu’ils vont polluer gravement la vie pendant des milliers d’années !
On oublie de nous dire que cette station est autorisée à rejeter toute l’année dans canal et rivières les liquides traités contenant un taux de 1 mg d’uranium maximum par litre, et dans l’air une quantité de 2,66 kg.
Et les autres installations du secteur : EURODIF I et II, COGEMA, COMURHEX font de même !
On évite de parler de toutes les autres substances (chlore, arsenic, mercure, plomb…), que l’une ou l’autre disperse journellement pour le plus grand bonheur des ouvriers des sites, des 45 000 personnes vivant dans un rayon de 10 km, de la faune et de la flore locale irradieuses abandonnées par la technocratie et les humains !
Ce 8 juillet, à deux kilomètres au sud de la Socatri, la teneur en uranium est à 64 microgrammes (µg/l) et le 13 juillet à 36,6 µg/l au lieu des 15 autorisés par la norme. Les nappes phréatiques, déjà souillées avant cet incident par 3 tonnes d’uranium déposés à ciel ouvert sous forme de résidus et ruisselant à chaque pluie, viennent de recevoir de quoi irradier pendant des milliers d’années et faire partager aux habitants ce don criminel de l’industrie nucléaire…
Le canal Donzère-Mondragon et le fleuve Rhône qui « bénéficient » de cette autre saloperie (après les dioxines…) sont devenus des égouts « autorisés » que citoyens et mairies acceptent sans broncher à nos risques et périls !

Le 8 août 2008 : Bancule en redemande !

Ce sont 18 m3 d’effluents radioactifs contenant 224 kg d’uranium qui ont coulé dans et hors de l’usine de Bollène, malgré toutes les mesures de sécurité. Et d’autres incidents mineurs ont lieu régulièrement avec cette matière dite énergie propre… La société concernée précise qu’une "décontamination des sols et des canalisations a été aussitôt engagée". _ Quand on sait que cette saloperie uranifère met des millions d’années à disparaître, l’Autorité de sûreté nucléaire a une redoutable tâche : Convaincre les riverains que le rejet 75 fois supérieur à celui autorisé pour l’année n’a aucune conséquence et que la sécurité est totale, persuader le consommateur que la région tricastine comme les Côtes-du-Rhône ne sont toujours pas radioactifs, assurer que rivières et Rhône ne sont et ne seront pas irradieux pendant les millénaires à venir à cause d’un banal dysfonctionnement.

En Janvier 2009, les labos EDF perdent leurs agréments

Défaillance généralisée des mesures de rejets radioactifs liquides et gazeux dans l’environnement par les installations nucléaires : Les laboratoires EDF, « qui mesurent eux-mêmes les normes du rejet des 19 centrales nucléaires françaises », viennent de perdre leurs agréments ! Suspendus ou refusés par quatre Décisions de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), en date de décembre 2008 ! Tout cela serait drôle s’il s’agissait de la pisse d’âne, mais combien d’habitants proches de ces industries auront une santé affectée par des installations dont on veut faire croire qu’elles sont irréprochables et propres ?

Le Rhône est donc bien un égout proprement irradieux pour longtemps…

1 juillet 2009 : Louloute en a marre !

Louloute la loutre, mascotte de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), trouve charmant quand celle-ci explique aux enfants qu’elle prend soin du Rhône et de ses habitants dans une publicité couleur titrée « L’énergie à l’état pur », puisque c’est sa mission.
Mais franchement, « l’état pur du Rhône » ce n’est pas un peu exagéré ? Si la CNR surveillait un peu mieux la qualité des eaux, louloute ne serait pas obligée d’ingurgiter des poissons, grenouilles et surtout les anguilles et épinoches, ses mets préférés, bourrés de dioxines et autres saletés industrielles. Chassée et piégée pour sa fourrure, l’espèce de Louloute est en régression, tuée par la route et maintenant par la pollution.
Qu’une compagnie sachant qu’un arrêté interdit aux pêcheurs de pêcher et de consommer, ne fasse rien pour que sa Louloute échappe à la pollution en dit long sur le sérieux de cet établissement l’empêchant de se lécher les babines en « cachant » la réalité…
Même décor côté dépliant publicitaire « fleuve Rhône, la saison » qui invite le touriste à des activités « pieds dans l’eau » tout l’été le long du fleuve, sans un mot sur les risques de pollution !
Curieuse cette insouciance commerciale mettant en danger enfants et parents qui vont jouer sur ou dans l’eau pendant les vacances ?
L’été méditerranéen sera-t-il pur pour le baigneur du bord de mer où le Rhône se jette et pour le flamant rose soumis au même régime que Louloute ?
De l’esprit du Grenelle, il ne reste donc plus que les mots…

Décembre 2009 : Enfin une bonne nouvelle sur le Rhône

Quatorze hectares de terres séparées du lit majeur depuis 100 ans par des épis et digues pour un usage agricole, sont aujourd’hui restituées aux crues du fleuve sur le territoire de Lamotte-du-Rhône. En 2002 et 2003, il y est venu sans avertir en provoquant des inondations catastrophiques et les responsables ont pris peur. Résultat : Dès 2004, 3,7 millions € sont prévus pour des travaux financés à 35 % État, 32 % CNR, 30 % Région Paca, 5 % Département de Vaucluse et aujourd’hui le Rhône est "autorisé" à s’y promener à nouveau si besoin…
C’est une goutte d’eau en moins au milieu de toutes celles que les maires bétonneurs et les administrations aveugles refusent de retenir, mais c’est un petit lac grenelleux dans l’océan de la stupidité durable.

Notes

[*] Bancule utilisé sous la forme : « C’est la faute à Bancule ». Terme populaire local grossier employé pour expliquer que c’est la faute à personne, tout en exprimant une grosse colère rentrée à l’encontre d’auteurs intouchables qui ne perdent rien pour attendre. Il faut lire, dans ce mot introuvable sur les dictionnaires, deux parties inégales dont la première (B) peut se définir par : « causée par une bande de petites b…… », et le reste se deviner dans les approximations suivantes : « …, auteurs maudits qui au lieu de respecter gens et milieux se comportent comme des e……, et nous prennent pour des c… ». Adaptables aussi bien envers les hommes politiques corrompus, les pollueurs inconséquents, les services techniques ou administratifs pervertis…


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